Une charte de l’Archevêque de Lyon datée de 653 évoque une paroisse nommée « Vallis incognita »
2. Situation géographique
Le village est en effet niché à 570 mètres d’altitude dans une vallée cachée par des collines verdoyantes. Des petits hameaux parsèment la commune.
3. Contexte historique
A l’époque carolingienne, les petits domaines seigneuriaux sont sous le contrôle de l’état. Au 10ème et 11ème siècle, le pouvoir royal s’affaiblit, donnant naissance aux grandes seigneureries. Les mottes cadastrales laissent la place aux châteaux, des maisons fortes sont édifiées au 13ème siècle. Elles deviendront plus tard des domaines d’exploitation agricole.
Parallèlement, les fondations monastiques se développent. En 1116, une communauté issue des Chartreux fonde le monastère de la Sylve Bénite, au Pin, qui se développera grâce à l’arrivée de Frère Thierry, fils naturel de l’empereur germanique, Frédéric 1er dit Barberousse.
Les moines façonnent le paysage, aménagent des étangs (Le Vivier, Batardet, Bresin-Breunelière …) pour le poisson, pour alimenter les moulins, mais aussi afin de drainer les terres humides pour les mettre en culture.
En novembre 1725, des pluies violentes grossirent torrents et ruisseaux, qui se précipitèrent dans les étangs. La crue détruisit les barrages, les digues, les chaussées, endommageant les moulins et les prairies.
En août 1789, pendant la révolution, les habitants de Valencogne et des communes voisines se rendirent à la Sylve Bénite pour exiger des moines la destruction des « Terriers », liste de biens attestant de leur appartenance aux Chartreux.
En 1791, un prêtre réfractaire caché par la famille Chapuis du Lambert, donnait clandestinement les sacrements dans cette maison.
Les biens des Chartreux seront dispersés et vendus : l’étang du Vivier est acheté par M. Revol de Saint Pierre de Paladru ; l’étang du Batardet sera asséché et mis en culture ; quant à celui de Bresins il sera déclaré « bien national » et partagé entre les « feux voisins »
4. L’Eglise Saint Jean Baptiste
Les sépultures médiévales ont été découvertes au lieu-dit Grand Etang de Breulenière, autrefois sur la commune de Valencogne.
En 1857, lors du mariage de Napoléon III, Le Conseil de Fabrique (comme on nommait alors le conseil paroissial) lui envoya une lettre de félicitations et de vœux très flatteuse. En retour la commune reçut un grand calice marqué de l’Aigle Impérial et de ces mots « donné par sa majesté l’Empereur Napoléon III – 1863 »
En 1874, l’église fut reconstruite sur l’emplacement de celle du 16ème siècle, alors en ruine. Toute la population aida au transport des matériaux. Beaucoup de galets proviennent de la colline de Notre Dame des Vignes. Faute d’argent, la flèche fut construite en bois et en ardoises, mais en 1888 la flèche et ses quatre clochetons en tuf du pays furent mis en place.
Le Conseil de Fabrique et les curés de Valencogne et Paladru peinèrent pour rembourser les emprunts. Mais la loi de 1905, par laquelle l’Etat pris possession de l’église et de ses dettes, mit fin à leurs tourments.
En 1913 la foudre fendit la cloche. Refondue par la maison Paccard d’Annecy, elle fut baptisée en grande cérémonie (la marraine étant le Comtesse Marthe de Kerdral de Paladru et le parrain Joseph Collomb du Surand) On l’appela donc Marthe-Joséphine. Le premier enfant dont elle sonna le baptême fut prénommé Marthe.
La foudre frappa encore le 31 décembre 1993 causant quelques dégâts au clocher. Elle frappa de nouveau le 19 septembre 2000 endommageant cette fois l’ensemble du bâtiment. L’église resta en travaux toute une année.
5. Notre Dame des Vignes
Deux versions différentes issues de la mémoire collective expliquent la mise en place de cette statue :
- Les paroissiens, inquiets de voir progresser le phylloxera confièrent leurs vignes à la Vierge et lui offrirent une statue en gage de cette foi qu’ils mettaient en Elle.
- La 2ème version parle des inquiétudes engendrées par l’imminence de la séparation de l’Eglise et de l’Etat.
La statue en fonte, achetée à Lyon fut acheminée par rail jusqu’à Saint André Le Gaz, puis par char. Elle mesure deux mètres et pèse 425 kilos. Avec son socle, elle culmine à 4 mètres 50.
6. Le chemin de Compostelle
Le village est une étape sur la « Via Gebennensis » nom donné au chemin qui relie Genève au Puy en Velay (soit 530 kms) en direction de Compostelle.
Les pèlerins arrivent par la Croix du Brocard, ils trouvent gîte et couvert dans le village, puis repartent par le chemin de l’ancien lavoir, montent vers les Cliaux, le Lambert, entrent dans les bois en direction de Brandoux, Le Pin, la Sylve Bénite.
Une statuette de Saint Jacques le Majeur (frère de Saint Jean l’Evangéliste) est visible à l’angle de l’ancien chemin du lavoir. Elle est en pierre polychrome de Montalieu et date de 2004.
7. Démographie : nombre d'habitants
1843 | 900 | 1911 | 543 | 1931 | 472 | 1936 | 441 |
1962 | 336 | 1975 | 326 | 1990 | 410 | 1999 | 458 |
2006 | 556 | 2011 | 611 | 2016 | 678 | 2021 | 729 |
8 . Ressources naturelles
Le bois
Il occupe environ 10% de la superficie, les essences sont nombreuses. En crête le châtaignier domine suivi du chêne du hêtre et du charme. A mi-coteau on trouve des frênes, des sycomores et des noisetiers. En plaine le saule côtoie l’aulne et le peuplier.
Les résineux ont été introduits aux 18ème et 19ème siècles. L’une des sapinières fut réquisitionnée par la Défense Nationale durant la guerre de 39/45. Les troncs assemblés en radeaux furent dispersés sur le lac de Paladru afin de dissuader les hydravions de s’y poser.
La pêche
Le Surand prend ses sources à l’étang du Vivier et hameau du Pomaret. Ses deux branches se rejoignent au sommet du village. Il traverse toute la commune ainsi que celle du Pin pour se jeter dans le lac de Paladru dont c’est le principal affluent. Au pied du village de Valencogne, il prend le nom de « ruisseau de Pisse-vieille »
Autrefois, il était très poissonneux, aujourd’hui le ruisseau n’a plus que 10 cm de profondeur. En été, hérons et autres oiseaux y trouvent encore leur nourriture.
La chasse
Au 19ème siècle, lièvres, perdrix, grives, cailles, faisans, canards constituaient le tableau de chasse. Le sanglier arriva après la 1ère guerre mondiale. Le chevreuil fut introduit vers 1960.
La première société de chasse fut créée en 1922. C’est en 1966 que les AACA virent le jour.
9. Activités agricoles
Jusqu’au début du 20ème siècle les paysans pratiquaient la polyculture vivrière (blé, avoine, orge, sarrasin, seigle) et l’élevage laitier.
D’autres cultures avaient aussi leur importance telle que la vigne et le chanvre. La culture du tabac fut autorisée en 1876.
Les cultures maraîchères et les vergers étaient entretenus avec soin.
Les premiers engins mécaniques arrivèrent au début de 20ème siècle. Avant l’apparition des batteuses, les paysans utilisaient des fléaux sur les aires de battage. On pouvait parfois voir jusqu’à 6 fléaux en action simultanément : la cadence des croisements devait être parfaite pour ne pas se blesser.
Le vin produit localement était baptisé « vin de Trois » car il était si acide qu’il fallait deux personnes pour soutenir le 3ème qui buvait.
Les bœufs travaillaient à la voix pour les attelages. Les vaches laitières étaient, après le vêlage, réconfortées avec des cataplasmes d’avoine et du vin chaud. En hiver elles recevaient, en complément de leur alimentation, la « péria » soupe d légume grossière, ainsi que des betteraves râpées.
Chaque ferme possédait son cochon. Quand on tuait le cochon c’était jour de fête : on distribuait aux voisins la « fricassée », voisins et amis partageaient le « Repas de Cayon »
En 1911 on comptait 152 chefs de culture, 138 en 1936, 60 en 1968 et 15 en 2011.
10. L’artisanat, le commerce
En 1906 il y avait 1 meuniers, 2 cordonniers, 2 galochiers, 1 tailleur de vêtements, 1 boucher, 1 horloger, 3 maréchaux ferrants, 5 charrons, 8 charpentiers, 1 maçon, 3 épiciers, 4 cafés, 1 berger, 1 boulanger, 1 chiffonnier, 5 couturières, 3 modistes.
En 1911, peu de changements : plus aucun galochier mais l’installation d’un coquetier, d’un voiturier et d’un étameur.
En 1968 on recense : 7 maçons, 1 charpentier, 1boulanger, 2 cafés, 1 épicier et 1 maréchal ferrant.
En 2011 on dénombre : 1 épicerie, 1 bar restaurant gîte, 1 gîte, 1 chambre d’hôte, 4 entreprises de travaux agricoles, 1 paysagiste, 1 électricien, 1 menuisier, 1 entreprise de travaux publics et maçonnerie, 1 entreprise multiservices, 1 entreprise de charpente couverture zinguerie, 1 entreprise de peinture revêtement et 1 taxi.
2022, l'épicerie et le bar-restaurant ont cessé leur activité depuis quelques années. La liste de tous les autres professionnels exerçant sur la commune est consultable sur ce site dans la rubrique "vivre à Valencogne" "vie économique".
11. L’industrie : le tissage
En 1906, 93 ouvriers dont la plupart travaillaient sur des métiers à bras, à domicile pour les industriels de Lyon et Voiron.
L’usine Mezin fur construite en 1912 et employait 40 personnes en 1920. Le dernier propriétaire fut la famille Vignard.
En 1924 une deuxième petite usine « Tissage, soie nature » est créée à l’initiative de M. Romain Foulu. Elle assurait toutes les étapes de traitement de la soie naturelle et a fonctionné jusqu’en 1968
En 1930, on comptait à Valencogne 2 usines, 80 métiers mécaniques, 82 ouvrières.
En 1970 on ne comptait plus que 14 ouvriers
L’usine Vignard a fermé ses portes à Valencogne en août 1999 et le bâtiment a été démoli en 2009.
12. L’habitat
La construction des maisons était conditionnée par les saisons et les travaux des champs Elle était prévue pour que les voisins soient libres de venir « donner la main »
L’hiver on préparait les fondations et le bois des toitures. Au printemps on s’occupait des murs de pisé. Le pisé nécessite une terre silico-argileuse bien compactable débarrassée des plus grosses pierres. Elle est utilisée en mai-juin quand elle « sève », c'est-à-dire quand l’humidité accumulée en hiver donne la sève aux plantes.
Les fondations étaient composées de galets, montés parfois 1 ou 2 rangs au dessus du sol.
Jusqu’au début du 20ème siècle, beaucoup de maisons étaient recouvertes de chaume. Les paysans cultivaient le seigle en prévision de la construction. Récolté en juillet, il était battu au fléau pour ne pas briser la paille. Les toits étaient recouverts à l’automne sur une épaisseur de 25 à 30 cm.
Pour faire face aux importantes chutes de neige, la pente des toits devait être d’environ 45°.
Sources: Evelyne Depardon, Roger Fournier, Bernard Berlioz, Paul Degoud